On a vu que les amas ont une fonction de corrélation de pente comparable à celle des galaxies. De plus, Tóth, Hollósi & Szalay (1989) et Jing et Zhang (1989) ont montré que leur fonction de corrélation à trois points peut être décomposée en somme de produits de fonctions de corrélation à deux points comme pour les galaxies:
avec une constante , comparable elle aussi à la valeur
déterminée pour les galaxies.
Szapudi, Szalay & Boschán (1992) ont récemment
confirmé la validité de la hiérarchie pour les galaxies jusqu'à N=8,
utilisant le catalogue du Lick, et confirment l'amplification
de la corrélation à deux points des amas relativement aux galaxies
et la validité de la relation (
) pour les amas.
Pour les galaxies une loi d'invariance d'échelle
a été observée pour les probabilités de vides, comme prévu par
les modèles hiérarchiques: la probabilité de vides normalisée,
, dépend seulement de
,
où
.
Il est naturel de se demander
si les amas montrent aussi cette propriété, et si la loi d'échelle
est la même que celle des galaxies.
En collaboration avec S. Maurogordato et M. Lachièze-Rey,
j'ai analysé différents échantillons d'amas extraits du
catalogue de Tully (1987b). Les probabilités de vides ont été calculées
avec des sphères de rayon R (avec typiquement entre 10000 et 100000
sphères pour chaque rayon consideré)
placées aléatoirement dans le catalogue,
et comptant les sphères qui ne contiennent pas d'amas.
Quant à , nous l'avons calculé directement à partir de
l'integrale
.
Si
suit une loi de puissance, on peut montrer que:
ce qui donne la relation approchée pour
.
Le comportement des probabilités de vides des amas
est très similaire à celui
des galaxies. Le catalogue limité à s'écarte des autres.
Cela n'est pas très surprenant, car ce catalogue enserre exactement
le vide du Bouvier.
Au contraire, l'échantillon le plus grand, limité à
, suit bien la courbe qui représente les galaxies.
Quand on a publié notre article (Cappi, Maurogordato & Lachièze-Rey, 1991,
qui se trouve en appendice), on estimait le catalogue complet à
80% jusqu'à
. Les données successives de Postman et al.
(1992) nous ont permis de compléter l'échantillon et
de confirmer le résultat.
La figure montre la probabilité de vides
de différents échantillons d'amas de galaxies, avec la courbe
qui définit la loi trouvée pour les galaxies CfA.
Figure: en fonction de
pour un échantillon d'amas
à
et
.
En perspective, les comptages pourraient nous offrir des
informations complémentaires. Le problème réside toujours
dans la faible densité des catalogues d'amas et la taille limitée des
échantillons à notre disposition.
Pour les comptages, nous avons utilisé les données de la
Deep Abell Redshift Survey (Huchra et al., 1990; HHPG).
Le catalogue HHPG couvre une région du ciel de 561 degrés carrés,
avec et
,
pour un total de 145 amas d'Abell avec
et
.
Leur décalage vers le rouge moyen est de 0.16.
La figure
montre les
en fonction de N
pour des rayons compris entre 5 et 65
Mpc ; pour chaque rayon on a utilisé
un million de sphères tirées au hasard.
Il est intéressant de remarquer que pour un catalogue poissonien
la pente des
devrait varier continuement en fonction du
rayon. Au contraire, dans notre cas aux rayons intermédiaires
les
montrent une pente fixe. Selon les modèles à invariance
d'échelle, cette pente doit être égal à
.
Sur la figure la ligne droite a une pente de -1.4, qui correspond
à
trouvé précedemment dans l'analyse des vides.
Il y a un accord satisfaisant avec les données.
On a dejà défini, dans le deuxième chapitre, les échelles
et
. Nous savons que le modèles d'invariance d'échelle
prevoient, pour des valeurs très grandes de
,
, où
quand
. Si l'on prend l'HHPG coupé à
, on voit
que
Mpc et
Mpc .
La prévision des modèles est qu'aux petites échelles (
),
les
montrent une chute exponentielle. Aux échelles
intermédiaires (
), on devrait observer la loi
avec une coupure supérieure pour .
Aux grandes échelles (
), on devrait avoir une
loi de puissance avec une coupure inférieure pour
.
Les figures
et
montent que
le comportement des amas semble comparable à celui des galaxies et
reproduise effectivement ces trois comportements.
Les modèles à invariance d'échelle prévoient aussi l'existence de
deux régimes extrèmes pour les comptages: les cas très denses, quand
, et très sous-denses, quand
,
dans lesquels existent des relations d'invariance d'échelle
caractérisées par les fonctions h et g:
est proportionnel à
quand
, N > 1 et
.
est proportionnel à
quand
.
La figure
montre la fonction h: il est évident
que les courbes correspondant aux valeurs différentes de N se regroupent,
que le fit qui correspond à
est une bonne approximation pour les
petits et,
surtout, la loi suivie est semblable à celle des galaxies du SSRS
(Maurogordato, Schaeffer & da Costa, 1992).
Figure: P(N) en fonction de N pour l' échantillon d'amas
HHPG limité à
Figure: en fonction de
pour l' échantillon d'amas
HHPG limité à
Un autre argument en faveur de ces modèles
est donné par la mesure directe des fonctions de corrélation moyennes
à deux et trois points, et
, ou de la
variance
et de la skewness
des
comptages, où
(Cappi & Maurogordato, 1993).
Or, dans le cadre par exemple d'un Univers à invariance d'échelle ,
on a une relation hierarchique entre les fonctions de correlation à
N points, et en particulier:
On devrait donc avoir la relation ;
c'est en effet ce que nous
trouvons pour les amas de divers échantillons comme pour les
galaxies CfA et SSRS (voir figure
), avec
.
Figure: --
pour différents catalogues de
galaxies et d'amas: CfA40 (asterisques), SSRS40 (cercles), N40
(croix), S40 (carrés)
Il faut donc conclure que les amas aussi suivent une distribution
à invariance d'échelle . Cela s'inscrit dans le cadre d'un univers où
les structures se forment par clustering gravitationnel.
Dans la théorie de la formation biaisée (Kaiser, 1984)
on peut supposer que la distribution des amas
reflète les mêmes propriétés statistiques que celle des galaxies.
Comme je l'ai mentionné dans le cas du plan fondamental, nous avons plusieurs
indications en faveur d'une origine identique des structures,
poussant l'idée que la gravité est un moteur suffisant pour expliquer
la distribution des structures que nous observons aujourd'hui.
Il reste à clarifier le rôle et la distribution de la matière
sombre .